La pomme de terre y est extrêmement productive, excellente et absolument indemne de toute espèce de maladie.
Elle pourvoit largement à la consommation de la population et donne même lieu à un certain commerce d’exportation, notamment pour l’approvisionnement des pêcheurs de la côte Nord du golfe, où elle vient mal.
Les navets et betteraves y poussent à merveille et en dimension remarquable, ainsi que toutes les racines : carottes, salsifis, raves, radis, etc.
Tous les légumes cultivés au Canada avec succès, y réussissent également bien : les choux de toute espèce, le chou-fleur, la laitue, les haricots, les pois, le céleri, la rhubarbe, etc.
Le fraisier, le framboisier, le groseillier, etc., poussent à l’état sauvage et donnent du fruit en abondance.
Le cerisier et le poirier ne se trouvent qu’à l’état sauvage. Il n’y a pas de raison pour que les arbres fruitiers du Canada, et, notamment, le pommier, n’y soient cultivés, si ce n’est que les habitants ne se sont jamais considérés assez sûrs du lendemain pour se déterminer à en planter.
Le bétail, le cheval, l’âne, le mouton, le porc prospèrent dans l’île, de même que tous les oiseaux de basse-cour.
Les conditions pour l’élevage du bétail et du mouton sont au moins aussi favorables à Anticosti que dans les provinces continentales du Canada.
Il y a, dans la plaine, des herbages et des prairies naturelles de cent jusqu’à cinq cents hectares et plus, où le foin d’excellente qualité croit à une hauteur de quatre et cinq pieds, et où l’eau douce se trouve an abondance, soit dans les rivières et leurs affluents, soit dans les lacs et étangs.
Ailleurs, les plateaux sont couverts d’une végétation prolifique d’un pois indigène, dont les habitants fauchent la tige pour servir de fourrage en hiver. Les plantes fourragères, dans les terrains cultivés, poussent à merveille à une hauteur peu ordinaire.
L’exemple de l’Islande, où l’élevage du mouton, bétail et du cheval a atteint un si grand développement, bien qu’elle soit située à 1500 kilomètres plus au Nord, témoigne de ce qui pourrait être fait sous ce rapport.
On aurait à Anticosti, l’immense avantage d’avoir, à proximité, l’écoulement assuré de toutes les productions de l’île, pour les approvisionnements en vivres frais et en légumes, de la flotte qui pêche dans les eaux du golfe pendant toute la saison d’été, et de celle des navires qui longent les côtes de l’île, à leur arrivée de l’Océan Atlantique, comme à leur départ.
Les forêts occupent la plus grande partie de la surface de l’île; la croissance des arbres y est rapide et témoigne de la fertilité du sol. Sur de grandes étendues, cependant, les arbres ne sont bons que comme bois à brûler, notamment sur les points de la côte les plus exposés, et dans la région Sud-Est de la plaine.
Mais, dans les montagnes et sur les collines, une puissante végétation d’arbres de haute futaie coure les deux versants, depuis la base jusqu’au sommet, ainsi que les dépressions donnant passage aux cours d’eau, sur une superficie qui est évaluée à plus de 200,000 hectares.
Les principales essences sont : le pin blanc, noir et rouge; le sapin, le frêne, l’aune, le tremble, le hêtre, le charme, l’érable, le peuplier et le bouleau jaune et blanc, souvent de grande dimension.
L’installation d’une ou de plusieurs scieries mécaniques, qui utiliseraient, en été, la force motrice des chutes d’eau, et, en hiver, l’abondance du bois à brûler, pour un moteur à vapeur, est l’une des premières nécessités réclamées par la population.
Tous les bateaux employés à la pêche par les habitants sont construits dans l’île; on en fait aussi pour les pêcheurs de la côte nord du golfe; on y a même construit des goélettes de bonne dimension.
C’est une industrie que toutes les circonstances favorisent. Il suffira de ne pas l’entraver pour qu’elle se développe naturellement.
Elle aura l’avantage inappréciable, pour la population sédentaire, de fournir du travail, pendant la saison d’hiver, aux ouvriers de toutes les professions qui s’y rattachent : bucherons, charpentiers, forgerons, calfats, voiliers tonneliers, etc.
On y trouve aussi, sur les plages, ses quantités considérables de troncs d’arbres à l’état brut ou équarris, qui sont jetés à la côte par les courants du Saint-Laurent et par les coups de vent, où les habitants vont s’approvisionner et les goélettes du continent viennent même prendre charge.
Sir William Logan a exprimé l’opinion, par analogie de la formation géologique de l’île avec celle de Terre-Neuve, qu’il pouvait s’y trouver des gisements métalliques. Il n’en a pas été découvert jusqu’à présent.
Les matériaux de construction : pierre à bâtir, calcaire ou grès, pierre à chaux, pierre à plâtre, terre de brique et sable, s’y trouvent en abondance.
Les rapports officiels mentionnent, au nombre des autres matières minérales susceptibles d’une utilisation industrielle : des dépôts de marne, de gypse et de phosphate en quantité plus ou moins considérable qui s’exportent pour l’île du Prince-Édouard.
Des bancs très étendus de beau calcaire cristallin coquillier, espèce de griotte de couleur jaune veinée de blanc, et des couches puissantes de grès d’un grain très fin, de couleur marron clair, affleurant l’un et l’autre à l’accore de la côte Sud; et, enfin, la tourbe, dont la grande tourbière du Sud-Est, d’une superficie de plus de 300 kilomètres carrés, sur une épaisseur variable de 1 à 3 mètres, constitue une masse énorme de plus de 400 millions de mètres cubes, surélevée de 5 mètres au-dessus du niveau de la mer, et conséquemment, d’un drainage et d’une extraction faciles.
Les animaux carnassiers ou dangereux sont inconnus dans l’île; le moustique est le plus malfaisant, mais le nombre en diminue dans les endroits cultivés.
L’Ours noir commun, remarquable par la beauté de sa fourrure, existe en assez grand nombre; il est absolument inoffensif. Aussi la Direction de l’île vise-t-elle plutôt à le protéger qu’à le détruire.
Au printemps, il descend sur les plages avec ses petites pour y manger le poisson mort, circonstance dont les habitants profitent pour lui faire la chasse.
En été et en automne, il reste dans les bois, où il se nourrit des fruits et baies sauvages qu’il y trouve en abondance, et est alors difficile à approcher.
Les autres animaux à fourrure sont surtout le Renard des différentes variétés, rouge, noir et argenté; la Martre dite du Canada et la Loutre.
La direction veille avec sollicitude à leur conservation; les trappeurs doivent se munir d’un permis du Directeur qui a soin de limiter leur destruction.
Il en a prohibé la trappe et la chasse, pendant ces dernières années, pour en reconstituer le peuplement.
Le gibier à plume. La perdrix ou «Grouse» du Canada, le parmigan, la bécassine, ainsi que pluvier et le courlis de plusieurs variétés, se trouvent en grande abondance, mais c’est surtout le gibier d’eau qui peuple l’île en quantité et en variétés incalculables.
L’Oie du Canada et d’autres variétés, et le Canard, de plus de trente dénominations, arrivent par milliers dans l’île dès la fin de mars, pour l’époque de la ponte, y restent tout l’été et une partie de l’automne, et la quittent en vols innombrables à la veille de la période de glace.