L'ÎLE IGNORÉE par Martin-Zédé, tome 2 |
Pages | 26 | |||||||||||||||||||
1 | 2 | 3 | 4 | 5 | 6 | 7 | 8 | 9 | 10 | 11 | 12 | 13 | 14 | 15 | 16 | 17 | 18 | 19 | 20 | 21 |
22 | 23 | 24 | 25 | 26 | 27 | 28 | 29 | 30 | 31 | 32 | 33 | 34 | 35 | 36 | 37 | 38 | 39 | 40 | 41 | 42 |
CHAPITRE XVIII 1910--1911
Quinzième campagne — La diphterie — Séjour au Jeffery Hale Hospital — Retour à l'île — M. Wilkinson et les Princeton boys — Le moulin des écorceurs — Le chemin de fer — Le bruleur — L'hôtel Ellis — Jupiter — Agrandissement du quai — Les «Tressell» — Découverte d'Oil Shales — Le grand camp d'hiver pour la coupe du bois
Cette année encore Henri Menier ne pût venir à l'île.
Je quittait le Havre le 7 mai sur la Provence, commandant Ponselet, et arrivai au quai nouveau de la Cie Transatlantique Pier 57, North River pour son inauguration le 13 mai.
À New-York, je trouvai Mr. Eshbaugh venu à ma rencontre, qui me mit au courant du travail exécuté à l'île depuis le commencement de la navigation. Beaucoup de matériel était déjà rendu et mis en place.
Le moulin était commencé, les fondation terminées ainsi que les conduites Lui-même était installé dans le chalet inoccupé et avait fait les prospections pour l'établissement de la voie du chemin de fer.
Une maison avait été faite pour les employés engagés par lui.
C'étaient en partie des «Princeton boys», Ingénieurs en cours d'étude de la grande école de ce nom aux États-Unis, qui venaient pour la saison d'été travailler à notre nouvelle organisation et lui rendaient déjà de grands services par leur intelligence, leur allant et leurs capacités professionnelles.
Il avait avec lui pour le seconder, son beau-frère Mr. Chapin, ingénieur de valeur qui demeurait chez-lui, et comme chef du moulin, Mr. Wilkinson un ingénieur spécialiste pour les constructions à faire.
Il avait sa comptabilité distincte de celle de l'Administration, comme je l'avais demandé, et avait bien en main tout son service.
Il repartait de suite à l'île, emmenant Mrs. Eshbaugh et ses deux jeunes enfants qui allaient y passer l'été.
Passant par Fall River, où m'avait conduit le «Priscilla» et Boston, je m'arrêtai à Montréal et arrivai à Québec très malade,
Je descendis chez Mr. Gibsone, mais le lendemain, souffrant d'un grand mal de gorge, un médecin appelé en hâte cru que j'avais un abcès et me donna deux coups de bistouri qui ne firent qu'empirer mon cas.
Le Dr. Rousseau a ensuite diagnostiqué la diphtérie, l'injection d'anti-toxine qu'on me donna n'eut pas d'effet, l'opération du bistouri m'ayant introduit la maladie dans le sang.
Je fus de suite transporté à l'hôpital de Jeffery-Hale où je fus admirablement soigné par le Dr. Carter, mais bien près d'y terminer ma carrière.
Je donnai un écrit à Mr. Gibsone et Eshbaugh pour qu'ils prennent d'accord la direction de l'Administration, M. Eshbaugh étant plus spécialement chargé des travaux à l'île.
Mr. Gibsone fut pour moi d'un courage et d'un dévouement à toute épreuve, venant me voir souvent deux fois par jour, malgré l'avis des médecins et les objurgations que je pouvais lui faire.
Enfin, après de bien mauvais jours, la convalescence arriva.
Fin juin, je partis sur le Savoy et trouvai en arrivant Mr. et Mrs Eshbaugh qui venaient de s'installer dans le chalet qui venait d'être terminé et Mr. Chapin qui demeurait avec eux, tous enchantés de leur séjour.
M. Malouin et Mr. Eshbaugh me présentèrent l'ingénieur du moulin, M. Wilkinson, ainsi que le véritable détachement militaire des «Princeton Boys», l'élite des élèves ingénieur civiles des États-Unis, MM. Good, Tounsans, Christy, Gillmore, Hallimond, Beamen, Giffin, Causse, Rengick et Russel le comptable.
Avec un pareil personnel, animé du meilleur esprit, j'envisageai avec optimisme l'avenir de notre entreprise et quoique encore médiocrement rétabli et je me mis au travail avec une ardeur que je ne me soupçonnais pas.
Mr. Eshbaugh venait de conclure un marché de plusieurs années avec un Finlandais, M. Kokko, de 100,000 cordes de bois de pulpe que celui-ci se chargeait de couper et de nous livrer sur nos wagons, à raison de 2 dollars 50 la core, tous les frais d'exploitation à sa charge.
Il livrerait au printemps prochain, les 20,000 cordes prévues.
Il avait avec lui des bûcherons dont une partie était déjà dans le bois installant leurs camps, faisant leurs chemins, leurs routes, organisant leurs magasins, les écuries pour les chevaux.
Certains ouvriers avaient avec eux leurs familles qui vivaient avec eux dans le bois.
Un marché avait été fait avec eux pour les fournitures dont ils pourraient avoir besoin qui leur étaient livrées avec pour nous un bénéfice de 20% sur le prix de facture moins 5% pour le cas où ils viendraient eux-mêmes prendre les fournitures aux entrepôts au lieu d'avoir à les leur livrer.
La maison des ingénieurs était très bien située sur la hauteur près du canal, dominant la baie avec une vaste terrasse sur le devant.
Un grand camp qui reçut le nom de camp des forestiers, où 300 hommes pouvaient être logés, était en voie d'achèvement sur la dune entre le lac et la Baie, à environ 100 mètres de la maison des ingénieurs,
Tout le terrain avoisinant avait été loti et des routes tracées parallèlement au carré de la grande place.
Il était en effet important de donner à nos constructions futures des alignements s'harmonisant avec le reste des établissements.
Nous prévoyons, en effet, de nombreuses maisons à construire au fur et à mesure de l'importance et du développement de notre organisation.
Je m'occupai de suite de notre magasin qui allait avoir à subvenir aux besoins d'une population de plus en plus importante.
Je fis mettre la voie du chemin de fer en avant entre lui et la mer et pour qu'elle pusse desservir en même temps l'entrepôt, la glacière, l'abattoir et la boulangerie.
Je la continuai devant des bâtiments.
La voie existait déjà en arrière de ces constructions, mais à un niveau très supérieur puisque étant en rez-de-chaussée en arrière, elles étaient à un étage inférieur du côté de la mer.
Les entrepôts et le magasin se trouvaient donc entre deux voies de chemin de fer et très bien desservie, puisque les wagons venaient approvisionner les bâtiments par en haut et en reprenaient les marchandises qui en sortaient par en bas, évitant ainsi une manutention considérable.
J'installai dans le rez-de-chaussée du magasin, le marché, qui se composait de la boucherie, la charcuterie, la poissonnerie, la crèmerie, ainsi que les départements des salaisons et conserves et des fruits et légumes.
En arrière étaient des glacières pour chaque division et en avant un large couloir pour les clients, avec grandes baies donnant sur la mer. De vastes portes donnaient accès sur la voie.
À l'entrée du magasin sur la place, il y eut le bureau de tabac et la librairie pour les journaux.
Deux ascenseurs faisaient communiquer le rez-de-chaussée avec le premier étage, ainsi que deux escaliers.
Je fis de même des ascenseurs et des escaliers dans le grand entrepôt. Ces services furent ainsi très améliorés.
On construisit près du moulin des écorceurs, un brûleur pour l'incinération des écorces et de la sciure de bois, car ces déchets allaient sortir de ce moulin en telle abondance qu'il était nécessaire de s'en débarrasser au fur et à mesure du sciage des billots.
J'organisai la voirie au point de vue de l'évacuation des ordures ménagères.
Chaque maison eut sa boite à déchets doublée en zinc avec couvercle.
Tous les matins, des tombereaux en prenaient le contenu et allaient le déverser dans le brûleur par un praticable aménagé à cet effet, où les tombereaux se déchargeaient par renversement sans manutention.
Je choisi en arrière du Cap Blanc, en surélévation sur la mer, un emplacement pour y transporter les matériaux de démolition et les débris que le brûleur ne pouvait recevoir, et ainsi la propreté fut assurée pour l'avenir.
On commença un réservoir de 100 tonnes qui fut construit sur la hauteur dominant le canal, où nous aurions toute l'eau sous pression pour nos établissements. Un moteur et sa pompe élevaient l'eau dans ce réservoir.
Dans le mois de juin, le bâtiment des écorceurs était très avancé et serait prêt pour fonctionner l'hiver.
La construction annexe reçut ses cinq chaudières munies du «dutch owen» (foyer renfermé dans une chambre) alimenté par la sciure de bois, qui y était amenée par des transbordeurs automatiques.
Malgré quelques syncopes, suite de ma diphtérie et plusieurs mauvaises journées, je pus toute de même accompagner nos amis: l'Honorable Turgeon, l'Honorable Édouard Garneau et Mr. Gibsone à Jupiter. Nous y débarquâmes le 18 juillet.
En six jours de pêche, nous prîmes 65 saumons, le plus gros pesait 22 lbs. Le poids moyen étant de 10.5 lbs. Nous étions un peu tard en saison.
Notre ami Turgeon amenait pour notre chef du Service de l'agriculture la médaille du mérite agricole de la province, qui lui était donnée par la Commission venue visiter nos établissements l'an dernier et avait trouvé nos étables, nos cultures et nos troupeaux en excellent état.
Pages | 26 | |||||||||||||||||||
1 | 2 | 3 | 4 | 5 | 6 | 7 | 8 | 9 | 10 | 11 | 12 | 13 | 14 | 15 | 16 | 17 | 18 | 19 | 20 | 21 |
22 | 23 | 24 | 25 | 26 | 27 | 28 | 29 | 30 | 31 | 32 | 33 | 34 | 35 | 36 | 37 | 38 | 39 | 40 | 41 | 42 |