L'un de nos plus savants musicologues, notre regretté ami Georges Kastner, membre de l'Institut de France, a dans son livre curieux des Cris de Paris, noté avec le secours du docteur Colombat les cris de la douleur classés en cris de douleur pulsatives — celles qui produisent une inflammation phlegmoneuse — en cris de douleurs gravatives, lancinantes, etc.
Dans le cri déterminé par l'application du feu, la victime fait entendre des tierces majeures, la médiante et la tonique. Le cri déterminé par l'action d'un instrument tranchant donne des intervalles de dixièmes, et quelquefois les sons chromatiques compris dans un intervalle de quarte augmentée.
Le cri des douleurs pulsatives forme une sixte majeure descendant chromatiquement sur la dominante. Le cri des douleurs lancinantes donne l'octave sur laquelle le patient fait entendre une sorte d'horrible trémolo. Les gémissements vont de haut en bas et produisent des tierces mineures mêlées d'intervalles donnant des tons et des demi-tons. Le cri de la coqueluche est un saut d'intervalle de quinte juste.
Le cri natif ou vagissant se manifeste par l'octave : enfin les cris des douleurs de l'enfantement se notent par l'intervalle considérable d'une dix-septième majeure.
Le cri de joie comme le cri natif forme l'octave ; le cri d'appel la neuvième majeure ; le cri d'effroi la quinzième majeure ; le cri de dégoût s'exprime par la quarte juste ; les sanglots par une note répétée de la médiante qui va tomber sur la quinte fausse soit ré naturel et la bémol pour se résoudre musicalement suivant les lois de l'harmonie sur la dominante du ton.
S'il est donc établi que l'homme est né musicien, et que toutes ses sensations s'expriment musicalement avant de se traduire par le langage parlé, et même par la pantomime, il ressort, par une juste déduction, que la musique des peuples varie nécessairement suivant leur race, le milieu dans lequel ils vivent, leurs mœurs, leur degré d'instruction, l'état de leur civilisation.
Quand Fernand Cortez visita les villes de Mexico et de Tezenco, capitales des deux plus puissants et florissants États de l’Anahuac, il dut être singulièrement surpris de voir dans quel état de civilisation avancée se trouvaient ces peuples dont les Européens ignoraient absolument l'existence.
D'où ces hommes étaient-ils originaires et quelle est leur histoire ? À cette question, l'historien américain Prescott (William-Hickling Prescott) répond qu'il y a très peu de notions certaines à glaner sur un peuple dont les annales écrites ont péri. Les plus savants ethnologistes en sont réduits aux conjectures.
Si, par la conformation de leur crâne, ces peuples semblent se rattacher à la race caucasienne, la couleur de la peau et l'absence de barbe les rapprochent des Mongols.
Le rabbin Monossis veut que les habitants du Mexique et du Pérou prennent leur origine dans une colonie hébraïque qui, poussée par le vent et les courants de l'Océan, aborda le continent américain.
Dans son livre sur l'origine des Américains, publié longtemps avant Monossis, Garcia émet la même opinion. Le nom de Jehova et le mot Alléluia, connus des Américains avant la conquête du Mexique, leur en offrent une preuve.
Pour Georges Horn (1620-1670), les Phéniciens sont les ancêtres des Américains, avec les Chinois, les Cantabres et les Huns.
Enfin, M. Fétis voit dans ce qui reste de la musique des anciens Mexicains et Péruviens, un argument nouveau et péremptoire en faveur de l'origine sémitique de ces peuples dit Nouveau Monde.
Quoi qu'il en soit, la plus remarquable des races qui peuplèrent le Mexique était, sans contredit, les Toltèques venus d'une direction septentrionale. Décimés par la famine, la peste et les guerres, ils disparurent du pays avec autant de mystère qu'ils y étaient entrés.
Le voyageur, qui contemple aujourd'hui les majestueuses ruines de Méfia et de Pentèque, écrit Prescott, croit y trouver l'œuvre de ce peuple extraordinaire.
Nous laissons aux ethnologistes modernes le soin d'examiner, après Gregorio Garcia, Diego Gonzales et Molena, les rapports des langues connues entre elles afin d'établir par cette comparaison, la filiation des peuples disséminés sur le globe.
Notre tâche, à nous, est de chercher ici, autant que cela nous sera possible, à déterminer, par les rapports de constitution tonale commune aux différentes races d'hommes, par la nature de leurs instruments de prédilection et le caractère mélodique de leurs chants, à quelles races d'hommes pouvaient appartenir les chants et les instruments de musique des primitifs habitants du Mexique et du Pérou parvenus jusqu'à nous.
Des fouille nombreuses ont été pratiquées à Palanqué et plusieurs instruments y ont été découverts.
Mariano Eduardo de Rivero, dans ses Antiquités péruviennes, ouvrage excellent qui n'a pas été, croyons-nous, traduit en français, offre les sources les plus instructives auxquelles puisse puiser un curieux des choses musicales de la vieille Amérique.
Ce savant espagnol rapporte qu'un général français, M. Paroissien, trouva, dans un tombeau mexicain, une flûte en pierre qui produisait des sons identiques à une flûte de Pan à huit tuyaux en roseau, rapportée de Pentèque par l'illustre Alexandre de Humboldt et dont il fit présent à M. Stewart-Traill, médecin anglais.
Cet instrument était accompagné d'explications extrêmement intéressantes. M. Eduardo de Rivero les a traduites en Espagnol pour son ouvrage; à notre tour, nous les traduirons de l'Espagnol pour en enrichir notre travail.
Les tuyaux de cet instrument sont au nombre de huit. Leur perce est cylindrique et régulière. Leur diamètre est de 0,3 de pouce, et leur longueur varie de la manière suivante :
N° 1. 90 N° 5. 2,85
N° 2. 50 N° 6. 2,45
N° 3. 12 N° 7. 2,00
N° 4. 50 N° 8. 1,58