CONCLUSION
Après l'audition do ces chants d'un si beau caractère et d'une tonalité si conforme à notre système actuel de musique, nous laissons à de plus perspicaces que nous le soin de conclure sur la race d'hommes qui les ont conçus.
Ce que nous disons avec certitude, c'est qu'ils sont séparés par un abîme de la musique chinoise ; c'est encore qu'on pourrait leur trouver quelques points de ressemblance avec certains chants liturgiques de l'ancienne Egypte ; enfin, c'est qu'ils sont, par la profondeur du sentiment et les qualités de la forme,— sinon toujours par la nature des intervalles, — dignes des productions éminemment expressives et poétiques dues aux musiciens populaires de la race blanche dans les pays montagneux du Nord.
Ces airs européens, en effet, sont généralement d'une inspiration simple, touchante, élevée, et se distinguent comme les chants péruviens par l'absence de rythme le plus souvent, et une mesure abandonnée au sentiment de l'exécutant.
Pour le peuple de l'ancienne Amérique comme pour tous les musiciens d'instinct, sous quelque latitude qu'ils aient vécu, la musique est l'expression triste et joyeuse, mais toujours spontanée, d'une âme sensible et naïve que ne vient jamais refroidir le calcul de la science et qui s'abandonne tout entière et sans contrainte.
Mais comme toute combinaison suppose un calcul, c'est peut-être en faisant allusion aux inspirations du genre de celles que nous offrent les anciens Péruviens que Leibnitz a pu exprimer cette pensée rayonnante et hardie « La musique est un calcul secret que l'âme fait à son insu. »
Les secrets de l'âme sont les secrets de la vie même, et nous bénissons humblement et avec respect, les âmes ardentes de la sublime ardeur dit beau, qui nous communiquent leur flamme et nous font vivre dans la sainte communion des sentiments qu'elles éprouvent, et qui sont l'honneur de l'humanité.